Féminicide de Mérignac : le procès de l'ex-mari de Chahinez Daoud s'est ouvert

Publié : 24 mars 2025 à 20h09 par Diane Charbonnel

Crédit image: Vibration

Le procès de l'ex-mari de Chahinez Daoud s'est ouvert ce lundi après-midi vers 14h30 devant la cour d'assises de la Gironde. L'homme comparait pour avoir assassiner son ex-femme en mai 2021, devant chez elle, à Mérignac. Retour sur cette première journée de procès.

Le procès de Mounir Boutaa, 49 ans, s'est ouvert ce lundi après-midi devant la cour d'assises de la Gironde. Il comparait pour assassinat. Il est accusé d'avoir tiré dans les jambes, puis brûlé vive sa femme, mère de trois enfants, devant chez elle, à Mérignac, le 4 mai 2021 en pleine rue, vers 18h20. Il est également accusé de violences avec armes à l'encontre d'un voisin qu'il a braqué pour qu'il n'intervienne pas alors qu'il allait mettre le feu au corps de son ex-femme. Il est également accusé de destruction volontaire d'un bien immobilier. Mounir Boutaa ayant mis le feu à la maison de Chahinez après le drame. Dès ce premier jour, l'accusé se pose en victime estimant avoir été "trahi", "injustement condamné" et avoir "passé toute sa vie comme un gentleman".  

 

Mobilisation des associations féministes

Avant l'ouverture du procès, des associations féministes se sont mobilisées devant le palais de justice en tout début d'après-midi. "Ce féminicide aurait pu être évité", nous explique Naïma Charaï, directrice de l'APAFED, et présente à cette manifestation. Cette affaire a été marquée par une série de défaillances de la part des services de Police. Chahinez Daoud avait notamment porté plainte contre son mari qui venait de sortir de prison pour violences conjugales, quelques semaines avant le drame. Cette plainte avait été mal renseignée. Cinq policiers ont depuis été sanctionnés. 

"Nous demandons au gouvernement de prendre toutes les mesures pour qu'il n'y ait plus d'autres féminicides" explique Naïma Charaï. "Nous demandons à la justice, une condamnation exemplaire de l'accusé". 

 

L'ouverture du procès et la victimisation de l'accusé

Dans la salle d'audience, les parents de Chahinez Daoud se trouvent au premier rang. Sa mère est en pleurs. Son père dissimule ses yeux derrière des lunettes de soleil face aux caméras et aux photographes. La cour se présente et la présidente ouvre la séance à 14h30. Dans le box des accusés, derrière les vitres, Mounir Boutaa se présente en costume blanc crème et chemise blanche. 

Après avoir tiré au sort les jurés, la présidente de la cour d'assises appelle les témoins et leur indique l'heure et le jour où ils seront appelés à la barre pour témoigner. En attendant cette date, ils ne peuvent pas assister aux débats et sont dans l'obligation de quitter le palais de justice. 

La présidente lit ensuite l'arrêt de la chambre de l'instruction qui rappelle les faits. Cette lecture dure plus d'une heure. Un moment difficile pour les parents de Chahinez.

Suite à cette lecture, Mounir Boutaa prend la parole en indiquant qu'il est "victime d'une association de malfaiteurs". Ses avocates explique lors de la suspension de séance que l'"association de malfaiteurs" avait déjà été évoquée à plusieurs reprises par leur client lors des interrogatoires au moment de l'instruction. 

 

La personnalité de l'accusé  

Après cette suspension de séance, la présidente interroge l'accusé sur sa personnalité. Tout au long de son audition Mounir Boutaa maintien sa position de victime.

À la question, quelles sont vos principales qualités et vos principaux défauts, Mounir Boutaa répond : "Je ne mens jamais, je suis quelqu'un de très gentil et très serviable. J'ai passé toute ma vie comme un gentleman."  Pour ses défauts, il répond qu'il est têtu

Quand la présidente lui demande s'il a déjà eu des passages à l'acte violents, Mounir Boutaa répond : "Je l'ai fait une fois, je regrette. À l'occasion, je vous raconterai, mais ce ne sont que des gens à qui j'ai fait du bien et qui m'ont trahi". 

Lorsque la question vous considérez vous comme quelqu'un de violent est posée, la réponse de l'accusé est non

 

Des violences lors de son premier mariage

L'enquêtrice de personnalité est appelée à la barre et revient sur la vie de Mounir Boutaa, de son enfance à sa vie avec Chahinez Daoud. Né en Algérie, il grandit avec sept frères et soeurs. Son père se montrait violent avec sa mère mais jamais envers ses enfants. Il estime avoir été chouchouté par ses parents. 

Il s'installe en 1999 en France, chez son frère. Il rencontre en mars 2000, une femme, déjà mère d'une petite fille de 6 ans. Ils se marient rapidement, quelques mois plus tard, et Mounir Boutaa obtient la nationalité française. Ils ont ensemble trois enfants.

Selon cette femme, Mounir Boutaa a des problèmes d'alcool et la situation se dégrade dès 2009. Il est victime en 2010 d'un accident du travail et aurait amplifier sa consommation d'alcool. Il pense alors que son épouse est infidèle. Fin 2011, sa femme lui annonce son intention de divorcer. La situation continue de se dégrader et sa femme porte plainte à deux reprises contre lui pour violences. Le divorce est finalement prononcé en 2015, année durant laquelle Mounir Boutaa rencontre Chahinez Daoud. 

 

"Elle avait un plan diabolique"

Face à ce récit de sa vie, Mounir Boutaa assure que sa première femme le possédait. Qu'il était "un esclave" et qu'il n'était là que "pour ramener de l'argent". Quant à sa consommation d'alcool, il explique qu'il buvait "comme tous les hommes". 

Il assure aussi que Chahinez Daoud avait un plan "diabolique" et qu'il n'y avait pas de violences conjugales. Qu'elle voulait se débarasser de lui après avoir obtenu la nationalité française. Qu'il a été condamné en 2020 alors qu'il était innocent.

Dans ses propos n'ayant pour certains pas de rapport avec les questions posées par la présidente, il va jusqu'à accuser Chahinez Daoud affirmant que c'est elle qui "était violente avec ses enfants". La présidente rappelle que Chahinez n'a jamais été condamnée pour ce genre de faits

Lorsque la présidente lui évoque ces trois précédantes condamnations pour violences, il explique ne plus s'en souvenir ou avoir été victime d'injustices. Lorsqu'elle tente également d'évoquer les rapports de Mounir Boutaa avec ses quatre enfants, l'accusé se perd dans des explications qui ne répondent pas aux questions. 

Mounir Boutaa, au discours souvent décousu, apparaît lors de cette première journée sûr de lui, certain d'avoir été victime d'injustices, n'hésitant pas à tenir tête à la présidente de la cour d'assises, tout en tenant parfois des propos incohérants